Avertissement : le texte qui suit n'est en aucun cas un vrai appel à la guerre. Il faut le lire au "second degré". Il me rappelle les "vieux" de mon village natal, assis sur un banc au soleil d'automne. Ils refaisaient le monde s'en prenant, par exemple, aux essais nucléaires qui détraquaient le climat... puis la conversation se terminait souvent par : "ce qu'il nous faudrait c'est une bonne guerre !".
C’est une bonne guerre qu’il nous faut
vendredi 28 septembre 2012 par Pièces et main d’œuvre (association grenobloise)
À l’appel de la Fédération européenne de l’industrie et de la CGT, nous manifesterons le 9 octobre 2012 pour l’industrie, pour l’emploi et pour des mesures de relance exceptionnelles - à Lyon à 11h place Jean Macé – comme à Paris, Bordeaux, Marseille, Epinal, Rennes, Toulouse.
La France et l’Europe traversent une crise sociale et économique sans précédent. Chômage de masse, précarité, dette publique, écroulement des services publics, désindustrialisation : si rien n’est fait, c’est tout notre modèle de développement qui s’écroulera, repoussant pour longtemps la perspective d’un retour durable de la croissance. Pourtant on connaît la voie à suivre : « un emploi dans l’industrie génère 3 à 5 emplois dans les services et la sous-traitance qui permettent, par la consommation des salariés, d’alimenter l’économie, donc le développement industriel et l’emploi » (CGT Isère). Pour que l’homme soit véritablement au service de l’économie, il faut des mesures de relance industrielle à la hauteur de la crise actuelle.
Nous devons tirer les leçons de l’Histoire. Il y a un siècle, l’économie française a connu un formidable bond en avant, son industrie une véritable révolution. Voyez l’essor de la région grenobloise dans les années 1915-1916 : aménagements hydroélectriques, boum dans la construction mécanique, floraison des sites électro-chimiques. Matériel électrique, explosifs, coton nitré, papier à cartouche, obus, chlore et phosgène comme gaz de combat, magnésium pour l’artillerie. Que seraient devenus la métallurgie de Bouchayer et Viallet, le chimiste Progil, les usines Bergès, les pâtes Lustucru, les biscuits Brun sans la Première guerre mondiale ? Les statistiques sont formelles : « En 1914, Grenoble compte 15 000 : ouvriers ; en 1931, le nombre aura plus que doublé : 31 000. La guerre aura eu un effet stimulant. » (1)
Toulouse, autre technopole aujourd’hui à la pointe de l’innovation, a connu le même phénomène : l’effort de guerre « a suscité la création de toutes pièces de puissants complexes industriels » (2), dont les fleurons actuels de l’aéronautique ou de la chimie sont les descendants directs.
Même stimulation bienfaisante pour l’innovation, l’industrie nationale et l’emploi en 1939-45. À Grenoble, les laboratoires - ferromagnétisme, aérodynamique, hautes fréquences, électrostatique, etc – servent le complexe militaro-industriel pour le profit des salariés. Ne l’oublions jamais : c’est grâce à la collaboration des chercheurs avec l’armée, dans les années 1940, que la capitale des Alpes est aujourd’hui la Silicon Valley française, et offre à des milliers d’ingénieurs, techniciens, cadres, opérateurs de salle blanche, un emploi et un avenir. Six années de conflit pour Trente Glorieuses.
Tandis que notre croissance agonise, il faut rappeler cette vérité : l’économie et la guerre ne sont que la poursuite incessante, infinie et réciproque de l’une par l’autre.
C’est pourquoi nous lançons aujourd’hui un appel solennel aux forces vives, aux progressistes, au mouvement social. Pour nos emplois et ceux de nos enfants, pour la réindustrialisation de la France, pour son redressement productif et moral, c’est une guerre qu’il nous faut.
Le « redressement productif » ne suffira pas - pas plus que le New Deal en son temps. Rappelons que le programme du président Roosevelt dans les années 1930 fut un échec économique. Malgré l’interventionnisme de l’Etat (grands travaux, contrôle des banques, subvention de l’agriculture, soutien aux syndicats et aux mouvements de consommateurs, protection sociale), 17 % de la population active américaine pointait au chômage en 1939. (3) « La production industrielle ne repartira qu’en 1940. Au moment où les Etats-Unis se réarmeront pour préparer leur entrée en guerre. » (L’Usine nouvelle, 2012)
Voyons les choses en face. Au sein de l’Union européenne, l’Allemagne méprise la solidarité entre membres, favorisant ses intérêts nationaux contre les autres pays. La Grèce est à genoux, l’Espagne, le Portugal et l’Italie au bord du gouffre, et l’impérialisme allemand impose sa politique d’austérité qui nous conduit à la catastrophe. Jusqu’à quand subirons-nous ce diktat ?
De son côté, la Chine nous inflige un dumping social insupportable, bafouant les droits des travailleurs comme ceux de la propriété industrielle et de la concurrence. Délocalisations, contrefaçon, exploitation : allons-nous tolérer davantage les abus sans limite des Chinois ?
Contre la Chine, avec nos alliés de l’OTAN, ou contre l’Allemagne, avec la Grèce, un conflit est envisageable. Ce ne sont ni les motifs, ni les occasions qui manquent. Songez aux retombées économiques ! La tentative du président Obama de renouveler l’expérience du New Deal – rebaptisée Green New Deal pour intégrer les nouvelles contraintes environnementales – est vouée à l’échec. Les énergies renouvelables, l’isolation des bâtiments, les biocarburants, la voiture électrique, s’ils permettront la création certaine d’emplois, ne fourniront pas l’électrochoc nécessaire à l’économie. Comme en 1939-45, seul l’effort de guerre relancera l’industrie. Avec Mélenchon pour le Rafale, avec Montebourg pour le patriotisme économique, soutenons la seule relance véritable !
Grenoble, dont les « nombreux laboratoires, centres de recherches et universités […] constituent une source inépuisable d’innovations dans laquelle la Direction Générale pour l’Armement pioche régulièrement » (4) , serait à la pointe de la mobilisation, avec des milliers d’emplois à la clé.
Chez Thales, soumis aux menaces de fermetures, on retrouverait le bénéfice d’être « leader mondial des hautes technologies sur les marchés de l’aéronautique, de l’espace, de la défense, des transports et de la sécurité » : un conflit offrirait des débouchés à nos armements de pointe. Imaginez les performances de Scorpion, le programme de numérisation du théâtre d’opérations que le groupe pilote pour l’armée française ! Sans oublier ses systèmes d’identification biométrique, de cryptage de données, de contrôle d’accès made in France. Nos fleurons high-tech donneraient leur pleine mesure. STMicroelectronics, le CEA et les start-up de micro et nanoélectronique équipent déjà nos troupes (programme Félin - Fantassin à équipements et liaisons intégrés) et les systèmes de communication et de traçabilité (RFID, capteurs, poussières intelligentes) ; Memscap fournit les meilleurs capteurs de pression à l’Eurofighter et au Super Puma 1, et des Mems pour le guidage des armes ; les détecteurs infrarouges de Sofradir, qui équipent l’armée française, ne manqueraient pas d’être déployés, de même que les biopuces d’Apibio pour détecter les attaques bactériologiques. Qu’on songe aux salariés de Rio Tinto, en Maurienne, d’Ascométal au Cheylas, et à toute la filière aluminium, à qui un cycle guerre/reconstruction redonnerait l’espoir d’un véritable redressement productif.
Pensez aux chantiers par dizaines ! Une aubaine pour les salariés du BTP et de Caterpillar, aujourd’hui menacés. Enfin le renouvellement urbain ! Une vraie chance de reconstruire la ville sur la ruine, de bâtir des smart cities avec des éco-quartiers connectés et intelligents, de moderniser les réseaux de transports et d’énergie, de remplacer les compteurs électriques par des Linky ! de donner un nouvel élan au programme nucléaire français (surgénérateurs, ITER), de propulser la ville globale dans le XXIe siècle !
Quant à nos soldats et aux civils touchés par la guerre, nos neurotechnologues les prendront en charge. Les mutilés testeront les nouvelles interfaces homme-machine et les exosquelettes mis au point à Clinatec, notre clinique du cerveau unique au monde. Leurs souffrances permettront les progrès de la bionique. Clinatec pourra tester ses implants neuro-électroniques contre la dépression et les troubles de l’humeur à grande échelle : quelle meilleure image pour nos savoir-faire locaux, dans le monde entier !
Chacun doit se convaincre que l’économie n’est pas faite pour l’homme, mais l’homme pour l’économie, et se demander ce qu’il peut faire pour celle-ci. Nous invitons tous ceux qui croient au redressement productif de la France à se joindre à la manifestation du 9 octobre, à signer et à diffuser cet appel.
Source
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NOTES
1) cf. 50 millions de Grenoblois. Claude Glayman. Préface de Pierre Mendès-France. 1967. Ed. R. Laffont
2) Les conséquences économiques et sociales de la Première guerre mondiale à Toulouse (1912-1922), Anne Alonzo, 2009, Ecole des Chartes
3) André Kaspi, Franklin Roosevelt, Fayard, 1988
4) Le Daubé 3/04/01
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