Gratuité des médiathèques
Monsieur le Maire,
Sur le site Internet de la ville, on lit : « Talence, la culture se conjugue au quotidien ». Pour réaliser pleinement cette conjugaison et permettre au plus grand nombre d’y participer, il semble que la gratuité de l’inscription, pour tous, s’impose dans les médiathèques (et la bibliothèque signalée sur le site). Or, à Talence, les médiathèques sont payantes, même si un certain nombre d’exonérations sont prévues.
Plusieurs communes de la CUB ont opté pour la gratuité des médiathèques (Mérignac, Pessac…). Dans une commune proche, le passage à la gratuité s’est traduit par une croissance de 20% du nombre total d’inscrits (adultes et enfants) ainsi qu’une croissance spécifique de 35% des inscriptions d’adultes. Ces résultats traduisent l’ampleur de l’impact de la suppression de la barrière tarifaire sur l’appétit de culture. De plus, parmi les groupes les plus concernés par cette augmentation, on note par ordre décroissant : les étudiants, les retraités et les employés. L’impact de la gratuité s’avère important pour les couches sociales les moins « aisées » de la population, celles qui souffrent de l’érosion du pouvoir d’achat, sans réelle compensation par des mesures sociales.
Sur un autre plan, la gratuité permettra d’aborder, dans des conditions optimales, la mise en réseau au niveau de la Communauté urbaine.
Bien entendu, la gratuité a un coût. Dans la ville proche citée plus haut, la suppression des droits d’inscription a engendré un coût annuel brut de 30 000 euros. Ce coût doit cependant être minoré par la soustraction du temps précédemment consacré par le personnel à la gestion de la régie.
Le coût net du passage à la gratuité mérite d’être chiffré pour notre commune. Néanmoins, il est vraisemblable que ce coût restera comparable à celui d’opérations culturelles, certes plus prestigieuses, mais aussi plus limitées en termes de population impactée.
En conséquence, je demande le passage à la gratuité, pour tous, de l’inscription dans les médiathèques de notre ville.
"Faire vivre la politique et non pas faire de la politique pour en vivre"...
Mon cher collègue,
RépondreSupprimerJe vous remercie de cette question orale concernant la gratuité des inscriptions pour tous dans les médiathèques de Talence.
Question importante surtout lorsqu’on a l’ambition de développer une politique culturelle en direction notamment des plus défavorisés et sur laquelle nous travaillons depuis environ deux ans, la directrice des médiathèques nous ayant interpellés sur ce sujet.
Sujet qui va me permettre de donner quelques indicateurs objectifs pour étayer les éléments de réponse que nous souhaitons apporter à ce questionnement en cours dans toutes les médiathèques.
1/GRATUITE POUR TOUS.
Quelle est la situation Talençaise ?
Les médiathèques sont effectivement payantes sauf :
• Pour les jeunes de moins de 18 ans
• Pour les étudiants
• Pour les Rmistes
•
IL y a en 2011 , 6586 inscriptions dans le réseau Talençais et seulement 1009 adultesTalençais payants soit 15, 32%,(1247 si on inclut les non Talençais soit 18,93% inscriptions payantes) donc environ 85% de gratuité
En 2006 par exemple, le taux d’inscription payante était de 24,41% ,15% aujourdhui .
Il est en baisse constante depuis, preuve de l’attention que nous portons aux difficultés sociales rencontrées par la population.
La gratuité a effectivement un coût comme vous le dites.
Comment se situe Talence dans le concert des politiques culturelles en faveur de la lecture des autres communes de la CUB ?
Pour établir des comparaisons, je vais vous citer quelques chiffres :
Il y a 6 villes sur 27 qui offrent une gratuité totale dans la Cub.
Le potentiel financier de Talence par habitant est de 742€ soit la 22ème position sur 27 .( Mérignac qui assure la gratuité a un potentiel de 1366€ et Pessac 982€)
Et pourtant Talence ville avec des ressources financières faibles donc, n’a pas à rougir de son action en faveur de la lecture et de la culture en général.
Nous sommes :
En 3ème position si l’on compte le nombre d’établissements derrière Bordeaux et Mérignac
En 3ème position si l’on prend l’indicateur volume hebdomadaire horaire d’ouverture :
(30H5 pour Talence , la moyenne des 31 établissements hors Bx étant de 20H7)
En 4éme position si l’on prend l’indicateur superficie utile, juste derrière Bordeaux ,Pessac et Mérignac )
Nous dépensons 2,91€ par habitant pour une moyenne nationale à 3,05€ en achats de documents
Et les dépenses en personnel par habitant sont de 25,16€ par habitant pour Talence (,22,15€ pour Pessac et 27 ,81€ pour Mérignac)
On peut donc voir en étudiant ces chiffres que la politique culturelle de Talence ne se concentre pas que sur des opérations de prestige même si je ne vois pas très bien de quelles manifestations vous voulez parler.
Quelle serait l’impact d’une gratuité totale sur les finances de Talence ?
24535€ représente le total des encaissements en 2011
En contrepartie, il y aurait une économie de 60 heures de travail par an correspondant à la comptabilité .
Aucune économie sur les inscriptions, qui représente un volume horaire annuel de 500H environ, voire une dépense supplémentaire si le nombre des inscriptions augmentent.
La gratuité favorise et stimule les inscriptions :30 % vous dites pour une commune voisine.
Comparons donc les chiffres
• 15,93% de la population Talençaise est inscrite dans le réseau des médiathèques
• Pessac qui est passée à la gratuité depuis au moins deux ans est à 13 ,21%
• Mérignac 16,56 %
Donc des chiffres tout à fait similaires aux nôtres.
Donc plusieurs questions peuvent être débattues concernant les bénéfices de la gratuité ?
Un effet d’annonce incontestable, lorsque vous développez une campagne de communication sur la gratuité mais la seule question qu’il faut se poser :est-ce que cela se traduit par une augmentation de la « consommation culturelle » ?
Le nombre d’imprimés prêtés par inscrit à Talence est de 4,15 par an, (3,96 à PESSAC)
Donc plus d’inscrits mais moins de prêts.
Comment expliquer cette anomalie ?
RépondreSupprimer« Devant l’érosion de la fréquentation, un certain nombre d’établissements et d’élus cherchent par tous les moyens à rendre leurs établissements plus attractifs et la gratuité est une arme de séduction » Cette citation n’est pas de moi mais de Olivier Ploux , bibliothécaire , dans un dossier spécial sur les bénéfices de la gratuité paru dans « livre hebdo mai 2010 »
Il constate plusieurs phénomènes positifs :
1/Hausse incontestable et instantanée du nombre d’inscrits lors dupassage à la gratuité :
120% en trois mois par exemple à Fontaine Isère
A Saint Brieuc le taux d’inscrits passent de 14,5% à 15,8% (je rappelle qu’à Talence nous sommes à 15,96%)
2/Plus d’adultes
Conséquence logique puisque les jeunes ne payaient pas et souvent les adultes (que les professionnels appellent dans ce cas passagers clandestins ) empruntaient sur la carte de leurs enfants
3 /Une atténuation des clivages socioprofessionnels avec une diminution de la surreprésentation des catégories moyennes et supérieures ;
4 / Une meilleure reconnaissance du public qui vit cette gratuité comme un juste retour des impôts versés.
Donc tout semble être idyllique avec la gratuité des médiathèques.
Et bien non car il y a une conséquence beaucoup moins heureuse :
Plus d’inscrits et moins d’emprunteurs
Le nombre des prêts annuels n’augmentent pas corrélativement à la hausse des inscriptions.
A Autun contre exemple puisqu’on est passé de la gratuité au payant, il y a eu une forte baisse des inscriptions les premières années mais cette baisse n’a pas entraîné une baisse proportionnelle des prêts.
Donc il est évident que si la gratuité parait séduisante, elle n’a pas l’effet attendu en terme de « consommation culturelle ».
La fréquentation du réseau de lecture Talençais où seulement 15%des inscrits paient est similaire aux réseaux gratuits des communes voisines.
23000 € c’est le budget de deux ans d’animation dans ce réseau.
Enfin je me demande après cet exposé, à qui profiterait vraiment cette exonération totale ?
Est il souhaitable que les catégories socioprofessionnelles supérieures soient dispensés de cette cotisation modique annuelle ?
Ne vaut il pas mieux investir cet argent dans la médiation culturelle au profit des populations les plus éloignées de la culture ?
Je rappelle qu’à Talence , l’école de musique est gratuite .
Olivier Ploux conclut en rappelant l’absolue nécessité d’une évaluation rigoureuse , sur le caractère fragile de la gratuité nécessitant de vivifier, entretenir, et enrichir l’offre en permance.
C’est ce que nous faisons à Talence, de la petite enfance jusqu’aux seniors, en passant par des partenariats avec l’éducation nationale dans les écoles primaires, en utilisant la médiation culturelle pour aller au devant des plus défavorisés, en développant des manifestations pour les plus exigeants ,en modernisant sur le plan numérique notre réseau, en reconstruisant ou déplaçant nos médiathèques
Nous restons attentifs à toutes les demandes en cas d’empêchement financier ou physique.
Et nous restons ouverts à une évolution de notre pratique en matière de tarifs si un besoin émergeait.
En ce qui concerne votre remarque sur la mise en réseau des médiathèques de la CUB , nous sommes en avance sur les autres communes, puisque nous venons de finaliser le choix du nouveau portail des médiathèques, seule Bordeaux et une autre commune de la CUB en sont à ce stade de la démarche.
Toutefois la première phase de la mise en réseau consistera, uniquement à une mise en commun des informations et ce n’est que dans un deuxième temps que l’on pourra envisager une mise en commun du catalogue et donc d’une éventuelle harmonisation des tarifs
Cela nous laisse donc le temps de la réflexion et une possible évolution de notre position
En conclusion, si on comprend que l’instauration d’une gratuité induit une hausse significative des inscriptions,il conviendrait de vérifier qu’à moyen terme, (effet d’annonce passée) ces inscriptions sont actives et induisent une hausse réelle de l’utilisation de la structure. Il s’agit d’avoir des utilisateurs actifs et non un nombre d’inscrits.
RépondreSupprimerNous resterons donc très attentifs aux indicateurs de moyens termes que pourront transmettre les structures ayant expérimenté cette mesure car jusqu’à présent le résultat des études sur ce sujet restent très mitigés quand à l’impact de ce levier en matière d’élargissement des publics et d’accès à la pratique culturelle pour les couches sociales les moins aisées,le frein économique n’est pas le seul à l’œuvre surtout lorsque le tarif est bas.