La fausse victoire des peuples sur le système :
les Trente glorieuses et le développementalisme
Depuis des siècles, un système d’exploitation, de domination et de contrainte a été mis en place au profit d’une infime minorité autoproclamée « élite ». Pour assurer sa pérennité et son développement, le système façonne son environnement en un ajustement structurel permanent.
Voici trois siècles que le système revêt la forme capitaliste à la recherche du profit à tout prix. Pour ce faire, il procède par étapes successives qui façonnent les structures de la société dans la poursuite de cet objectif. Chaque étape correspond à une configuration spécifique du rapport social qui prépare la suivante.
Lorsqu’une configuration d’exploitation donnée se révèle moins profitable qu’une autre option, le système modifie la configuration initiale. Il arrive cependant qu’une étape donne l’impression d’un relâchement de l’exploitation et d’une « victoire » du grand nombre sur l’élite. En réalité, il s’agit simplement, d’une carotte, d’un subterfuge… destiné à faciliter un ajustement des structures sociétales en vue d’une étape ultérieure.
Après le choc de la deuxième guerre mondiale, le « capitalisme de la séduction[1] » va permettre au système de procéder à un ajustement des structures sociétales tant au Nord que dans les pays du Sud.
Cet ajustement est généralement présenté comme une « victoire » des peuples sur le système capitaliste et sur l’exploitation coloniale. Les Trente glorieuses au Nord et la phase développementaliste au Sud auraient été des « jours heureux » dont nombreux sont ceux qui en parlent avec nostalgie comme d’un « paradis » perdu qu’ils souhaitent retrouver.
Débutant dans l’après deuxième guerre mondiale, ces deux étapes quasi concomitantes ont été marquées par une croissance économique forte avec la mise en place du fordisme (et du fordisme périphérique au Sud) dont l’objectif était la consommation et la production de masse au sein d’une économie régulée par l’intervention de l’État.
Au Nord comme au Sud il s’agissait de se rapprocher, plus ou moins rapidement, du « rêve américain » représenté par « l’ère de la consommation de masse », dernière étape du processus de développement selon le schéma de Walt Whitman Rostow[2].
Promu par les agents du système, le projet assimilant consommation et bien-être, progrès et destruction des structures économiques et sociales existantes, liberté et immoralité a été progressivement imposé.
La structure de la société a été « modernisée », façonnée pour la rendre prête à entrer, sans trop de soubresauts, dans l’étape suivante du néolibéralisme. Cette dernière débutera à la fin des années 1970 notamment avec les élections de Margaret Thatcher au Royaume-Uni, de Ronald Reagan aux États-Unis et la crise de la dette du Tiers-Monde en 1982.
Bernard CONTE
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