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lundi 1 juillet 2024

Wokisme et obscurantisme

Au cours des deux dernières décennies, deux ensembles politiques sont devenus très influents dans les sociétés occidentales : le « déconstructionnisme » (ou « progressisme » ou, dernièrement, « wokisme »), issu de diverses fractions d’extrême gauche, et le « fondamentalisme » (ou « obscurantisme », « communautarisme » ou néo-« tra­ditionalisme »), véhiculé essentiellement par des populations d’origine immigrée opérant un retour identitaire. Ces deux ensembles ont en commun la reprise de réflexes et de mécanismes proto-totalitaires identifiés, mais leur articulation reste largement impensée.

Les nébuleuses progressistes et les galaxies obscurantistes

Plutôt que deux mouvements circonscrits, il s’agit de vastes ensembles, tantôt diffus tantôt structurés, à replacer dans deux dynamiques distinctes visant des objectifs différents.

Le « déconstructionnisme » cherche passionnément à « déconstruire », c’est-à-dire discréditer, délégitimer et détruire, tantôt ou simultanément, la différence sexuelle (néo-féminismes), les pratiques alimentaires (végans), le mode de vie (écologistes « radicaux »), l’enracinement (militants humanitaires), l’organisation sociale dans sa globalité (néo-gauchistes), la totalité des savoirs humains (les «  studies  »), etc. De son côté, le « fondamentalisme » cherche à imposer sa sécession religieuse (islamisme ou néo-évangélisme), son séparatisme ethnique (communautarisme et sécessionnisme), sa hiérarchie raciale (racialisme), son ordre moral (néo-sexisme), etc.

Ces deux grandes tendances de moins en moins minoritaires – les premiers dans les institutions médiatico-politiques, les seconds dans les métropoles et leurs couronnes urbaines – semblent s’opposer politique­ment ; le « déconstructionnisme » étant une résurgence de postures progressistes d’extrême gauche, le « fondamen­talisme » dans son conservatisme caricatural incarnant une extrême droite totalement décomplexée. Mais on les voit pourtant s’hybrider de manière spectaculaire dans l’islamo-gauchisme, l’indigénisme, l’insurrectionnalisme, l’écologie décoloniale, le néo-féminisme ou le sans-frontiérisme.

Prise en tenaille

Cette convergence apparemment contre-nature n’est ni fortuite ni tactique : son ciment est une haine viscérale des sociétés occidentales.

Elle forme une véritable tenaille destructrice : le « déconstructionnisme » cherche à détruire de l’intérieur les fondements de nos sociétés contemporaines sans même chercher à formuler une alternative crédible tandis que le « fondamentalisme » impose, d’un extérieur revendiqué, des valeurs exogènes et des (pseudo)-principes tradition­nels sans pouvoir – ni même essayer – de réfuter ceux des cultures d’accueil ; le premier, élitiste et avant-gardiste, déconstruit d’en haut, le second, populaire et diffus, refonde à partir du bas pour miner les sociétés occidentales ; le post-modernisme de celui-ci s’articule avec le pré-modernisme de celui-là contre les acquis de la modernité ; le ver­nis politico-intellectuel de l’un et l’ancrage populaire de l’autre forment illusion dans la perspective commune d’en finir avec les principes des Lumières, les acquis du monde moderne, et la spécificité du projet d’autonomie de la ci­vilisation occidentale.

Détestation des fondements démocratiques de l’Occident

Ce qui est honni dans cet Occident n’est pas, très précisément, ce qu’il se reproche lui-même sans cesse depuis son apparition mais, tout au contraire, son principe même d’auto-institution, la capacité d’auto-critique et d’auto-trans­formation d’une société.

« Déconstructionnisme » comme « fondamentalisme » sont de ce point de vue anti-démocratiques : le premier rend impossible toute délibération rationnelle (ou simplement raisonnable), le second brandit une parole révélée ou un état de fait indiscutable. Cela se retrouve dans leurs modes d’action (censures, interdictions, intimidations, me­naces, violences) comme dans leur stratégie (mépris sans bornes pour les « petites gens » simplement dubitatifs face à leurs délires, particulièrement s’ils sont occidentaux ou occidentalisés).

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